mardi 23 janvier 2024

La vie rêvée des bourgeois

Flâner sur Instagram est toujours l'occasion de faire un voyage en terre inconnue. La page de The Socialite Familly est en cela un ravissement. 

Il existe ici un art de la mise en scène pour la haute bourgeoisie financière et/ou intellectuelle. Les portraits de famille à la peinture à l'huile sont démodés, place à l'exhibition la présentation de son intérieur.

Tout ici est calme, luxe et volupté. L'appartement parisien fait 200 m2, la maison de campagne est nichée dans un paysage de carte postale. Tout est beau, à sa place, de bon goût. Tout est chic avec le petit détail chiné qui fait la différence. On voit beaucoup de livres aussi. 

Face aux photos surexposées et à l'interview bienveillante ou l'entre-soi suinte à chaque mot, mes émotions oscillent entre envie, admiration et mépris. 

Bien sûr tout est beau et bien pensé. Justement là est le problème : ces intérieurs se ressemblent tous, stéréotypes de classe hurlant leur mépris, décors de théâtres froids et désincarnés. De Chirico n'est jamais très loin, l'être humain lui est ailleurs. Même le souvenir de famille ou l'objet chiné ne parviennent pas à réchauffer l'atmosphère.
Ils sont là comme des astres morts posés sur l'étagère du vide (une étagère à 2000 euros, pièce de designer unique).

Pourquoi l'esthétique du quotidien doit-elle être propre sur elle, bien peignée, sans rien qui dépasse ? Pourquoi admirer ces intérieurs où l'on habite mais où l'on ne vit pas ? Pourquoi ai-je une fascination quasi morbide à regarder ce genre de choses au lieu de regarder des vidéos de chatons ? 

Peut-être dans le fond suis-je un neo-bourgeois essayant de s'approprier les codes des autres, de ceux qui sont établis. L'habitus ne s'achète pas, il s'acquiert lentement, il s'infuse par micro dose. Dans le fond, j'aimerais avoir leur tranquillité d'esprit, moi l'intransigeant (merci à l'autocorrecteur), leur confiance en leur droit divin d'être et d'avoir. Ils ne doutent pas, ils prennent et se donnent à voir, mettant en scène leurs réussites. Ils ont le droit, leur vie est évidente. 

Qu'il doit être doux de vivre dans un océan de certitudes. Ils ont de la chance. Je les jalouse. Je les admire. Je les méprise. Puis je passe à autre chose car il faut bien continuer a vivre avec eux au quotidien et faire oublier d'où je viens. 


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