mardi 11 septembre 2018

La frustration et la peur

La frustration et la peur sont les deux moteurs de ton comportement, les deux facteurs qui te font agir, t'enchaînent et te soumettent :
- La frustration c'est la compétition permanente, la comparaison incessante avec l'autre, plus beau, plus riche, plus stylé, plus drôle, plus fort. Pris au milieu d'un maelström d'images, drogué à Instagram, tu te sens trop souvent minable. Tu aimerais toi aussi appartenir à cette frange de happy few parfaits, trop parfaits, plus que parfaits. Alors tu les imites maladroitement, tu consommes, tu crames, tu fais fonctionner le commerce (c'est le but). Mais ta frustration ne se calmera jamais car tu seras toujours derrière, en retard d'une mode ou d'une réussite éclatante.
- La peur c'est l'autre pulsion qui t'anime. Tu as peur du ridicule, peur de ne pas être assez bien, peur de perdre le peu que tu as (emploi, statut, conjoint, peu importe). Cette force consolide tes frustrations et te pousse à t'agiter en tous sens pour être la personne que d'autres te disent d'être. Tu essaies de t'accrocher, de rester à la page avant peu à peu de décrocher, bouffé par l'âge, la fatigue et la résignation. Alors, l'aigreur commence à brûler ton âme et ton cœur et tu te rabougris peu à peu. 

La frustration se combat en s'isolant au maximum des injonctions contradictoires de l'extérieur, en analysant froidement ces images parfaites et désincarnées, en comprenant l'envers du décor. Tout cela n'est qu'artifice permettant de vendre du papier ou des clics, tout n'est que représentation du bonheur et de la réussite. Rien n'est vrai, tout est rêvé. 

La peur est plus coriace, surtout quand on ne peut se permettre de perdre le peu que l'on a. Il y a sûrement un travail patient et difficile à faire sur la frugalité, la saine curiosité permettant de rebondir et de faire autre chose de sa vie au besoin. Apprendre à ne pas s'attacher à une vie existante, même précaire et insatisfaisante, est sûrement le combat personnel le plus difficile à mener. C'est consentir au destin et au hasard, c'est renoncer au contrôle et à la stabilité au profit de la féconde incertitude. C'est certainement l'oeuvre d'une vie. 

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